LES FIBROSES PULMONAIRES

ET LA FIBROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE

 

Les fibroses pulmonaires sont des maladies qui peuvent conduire à l’insuffisance respiratoire. Leurs causes sont multiples. Parfois aucune cause n’est trouvée, il peut s’agir alors d’une fibrose pulmonaire idiopathique, forme la plus grave.

 

Les pathologies interstitielles pulmonaires ou fibroses pulmonaires sont la conséquence de l’altération de la membrane alvéolo-capillaire par de l’inflammation et/ou à la fibrose du tissu interstitiel (tissu de soutien entre les alvéoles), partie la plus sensible des échanges gazeux du poumon (oxygène/gaz carbonique). Elles rassemblent plus de 200 maladies différentes. Les plus fréquentes ? La sarcoïdose, la fibrose pulmonaire idiopathique ainsi que les connectivites, au premier rang desquelles la polyarthrite rhumatoïde, mais aussi les pneumopathies d’hypersensibilité liées à l’inhalation d’agents organiques (poumon de fermier ou des éleveurs d’oiseaux par exemple) et les maladies liées à la toxicité de certains médicaments. Autres maladies pouvant entraîner une fibrose pulmonaire : l’asbestose (maladie liée à l’amiante) et la silicose.

 

Chez 65% des patients atteints, la maladie diagnostiquée reste de cause inconnue: il en est ainsi, parmi d’autres maladies, de la fibrose pulmonaire idiopathique. Pour d’autres, des facteurs exogènes sont responsables : matériels organiques (poussières d’origine végétale ou animale) et inorganiques (poussières minérales ou métalliques), certaines infections (tuberculose miliaire, pneumocystose…) ou médicaments.

 

Symptômes des fibroses pulmonaires

 

Le symptôme principal des pathologies interstitielles pulmonaires est un essoufflement (dyspnée) progressif, à l’effort tout d’abord, puis également au repos lorsque la maladie a évolué. Les autres signes possibles sont une toux sèche qui doit alerter lorsqu’elle est persistante et l’existence de râles crépitants pulmonaires à l’auscultation et, plus rarement, une déformation des ongles en verre de montre décrite sous le nom d’hippocratisme digital.

 

Diagnostic des fibroses pulmonaires

 

Le diagnostic se fait par un interrogatoire minutieux relatant les expositions éventuelles, professionnelles ou non, les habitudes tabagiques, la notion d’antécédents familiaux similaires, les antécédents médicaux personnels et les traitements suivis, et l’historique des symptômes, un examen clinique du thorax mais aussi général pour rechercher les manifestations d’une maladie systémique (connectivite, sarcoïdose etc…) et une radiographie thoracique. Dans 10% des cas, la radiographie peut rester normale. La tomodensitométrie (scanner) thoracique est un examen clé, qui permet de révéler l’atteinte pulmonaire et de déterminer ou en tout cas d’orienter la maladie en cause. Une endoscopie (fibroscopie) bronchique avec lavage broncho-alvéolaire peut être réalisée, une exploration fonctionnelle respiratoire (EFR) permet également d’évaluer au mieux le degré de retentissement de la maladie, tout comme le test de marche des 6’.

 

Traitement des fibroses pulmonaires

 

Si un agent causal sous-jacent est en cause, il devra être éliminé (médicament, aéro-contaminant. Le tabagisme qui peut jouer un rôle favorisant pour certaines maladies est dans tous les cas délétère et doit faire l’objet d’une prise en charge. Le traitement des fibroses pulmonaires post-inflammatoires (par exemple sarcoïdose) vise à empêcher la réaction inflammatoire, afin de limiter le développement du tissu cicatriciel. Il consiste en l’administration de cortisone, d’immunosuppresseur et d’oxygène. Quand la maladie est à un stade très avancé, une transplantation peut être proposée.

 

Zoom sur la fibrose pulmonaire idiopathique

 

La fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est la plus fréquente des fibroses pulmonaires. C’est une maladie particulièrement grave qui se manifeste par un essoufflement progressif évoluant vers l’insuffisance respiratoire.

 

Cette maladie est caractérisée par une altération des poumons (fibrose) qui se rigidifient et ne parviennent plus à assurer de façon correcte la respiration. On ignore encore à quoi est due cette maladie. Plusieurs hypothèses ont été émises. Actuellement, les chercheurs pensent que le mécanisme en cause serait une agression des alvéoles des poumons par des facteurs encore mal identifiés. Celle-ci déclencherait alors la formation non contrôlée de cicatrices dans les poumons (fibrose). (1) Un certain nombre de FPI (5 à 15% des cas) sont d’origine génétique : plusieurs membres d’une même famille peuvent être touchés.

 

La prévalence de la fibrose pulmonaire idiopathique (nombre de personnes atteintes à un moment donné dans la population) est très inférieure à 1/2000. C’est donc une maladie rare. La prévalence augmente avec l’âge : très rare avant l’âge de 50 ans, la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) débute le plus souvent entre 60 et 70 ans. Elle touche un peu plus les hommes et est souvent diagnostiquée à un stade tardif.

 

La FPI s’aggrave de façon progressive et peut provoquer une insuffisance respiratoire grave, conduisant au décès. La maladie peut ne pas trop évoluer pendant des années ou au contraire s’aggraver rapidement. Les infections respiratoires aggravent la maladie.

 

Les symptômes de la fibrose pulmonaire idiopathique ? Dyspnée progressive (essoufflement), toux sèche dont la persistance nécessite de voir un spécialiste, râles crépitants, hippocratisme digital (dans 25 à 50% des cas ; il s’agit d’une déformation des doigts (renflement de la phalange de l’ongle en baguette de tambour alors que l’ongle est habituellement bombé en « verre de montre »).

 

Le diagnostic se fait à l’aide de plusieurs examens. Tout d’abord par l’imagerie pulmonaire : radiographie et surtout scanner, qui permet un diagnostic dans plus de la moitié des cas. Ce dernier montre des opacités dans les poumons correspondant aux zones de fibrose. Celles-ci peuvent avoir un aspect très caractéristique en « rayons de miel » quand la maladie a déjà progressé. Une fibroscopie avec lavage broncho-alvéolaire (LBA) peut être effectuée : le LBA - instillation de fractions de 50ml de sérum physiologique dans un segment pulmonaire lors d'une fibro-bronchoscopie, réaspirées et analysées du point de vue cytologique, immunologique, bactériologique, minéralogique -permet surtout d’éliminer des maladies ayant des symptômes similaires à la FPI. Lorsque ces examens ne permettent pas un diagnostic de certitude, une biopsie pulmonaire chirurgicale peut être réalisée. Pour évaluer la capacité respiratoire et ainsi voir si la maladie est à un stade précoce ou avancé, une exploration fonctionnelle respiratoire (EFR) est effectuée.  

 

 

Tabac et fibrose pulmonaire  

 

Les études récentes soulignent que, bien que les fibroses aient des origines multiples, le tabagisme est un facteur de gravité dans les fibroses idiopathiques et peut être un facteur au moins partiel de cause de fibrose. En particulier, dans le cas de fibrose pulmonaire d’origine génétique.

 

Source : DA, Keane MP, Belperio JA, Strieter RM, Lynch JP 3rd, Pulmonary fibrosis, Methods Mol Med. 2005;117:3-44

 

 

 

(1) Fiche « la fibrose pulmonaire idiopathique », Orphanet, septembre 2008 

Sources : fiche « la fibrose pulmonaire idiopathique », Orphanet, septembre 2008 ; Cootin V., Cordier JF., Fibrose pulmonaire idiopathique, Encyclopédie Orphanet, juillet 2006 ; dossier de presse CPLF 2011,

 

Le traitement actuel de référence ne guérit pas la fibrose pulmonaire idiopathique. Il permet juste de freiner la progression de la maladie. Le point avec le Dr Bruno Crestani, pneumologue à l’hôpital Bichat-Claude Bernard (Paris).

 

« Un seul traitement améliore réellement la survie : c’est la transplantation pulmonaire » explique le Dr Bruno Crestani. Elle est proposée aux personnes de moins de 65 ans, arrivées à un stade évolué de la maladie.

 

La trithérapie de référence pour la fibrose pulmonaire idiopathique repose sur l’administration de cortisone à faible dose, d’immunosuppresseurs et d’un anti-oxydant, la N-acétylcystéine. On traite ainsi la réponse inflammatoire des poumons en espérant que la réduction de l’inflammation préviendra l’extension du tissu cicatriciel (fibrose) dans les poumons et freinera la progression de la maladie. D’autres mesures sont plus symptomatiques : oxygénothérapie et réhabilitation respiratoire. A cela, s’ajoutent parfois « des inhibiteurs de la pompe à protons », médicaments utilisés pour diminuer la quantité d’acide produit dans l’estomac, car le reflux gastro-oesophagien pourrait participer à l’évolution de la maladie » ajoute le Dr Crestani. Certains malades ont un syndrome d’apnées du sommeil associé à la fibrose : « nous le traitons s’il est sévère » indique ce pneumologue.

 

Il faut bien sûr arrêter de fumer. La vaccination annuelle contre la grippe est conseillée, tout comme celle contre le pneumocoque.

 

 

 

 

 

 

 

Témoignage fibrose pulmonaire idiopathique

 

« Je suis aujourd’hui sous oxygène 24h/24 »

 

Marie-Thérèse Ruste, 68 ans (71)

 

« A la fin de l’année 1999, alors que j’étais en voyage, j’ai commencé à tousser subitement. En rentrant, je suis allée voir mon médecin, qui m’a prescrit un traitement pour une pneumocystose. Sans effet. Je suis retournée le voir, il m’a prescrit un deuxième traitement, sans effet lui non plus. Il m’a alors adressée à un pneumologue. J’ai passé toute une batterie d’examens qui ont révélé que j’avais une fibrose pulmonaire, vraisemblablement idiopathique. J’ai continué à voyager, à travailler. En 2006, mon pneumologue m’a adressée au Pr Cordier, à Lyon, un des spécialistes de cette maladie. Celui-ci m’a dit que la maladie évoluait pour le moment très lentement. A partir de 2006, ma maladie a commencé à s’aggraver et cela a encore empiré en 2008. J’étais très essoufflée, fatiguée. Je savais qu’il n’y avait pas de traitement efficace. Début 2009, je suis retournée dans le service du Pr Cordier à Lyon et celui-ci m’a parlé d’un nouveau traitement que je pourrais peut-être essayer. Il fallait que je fasse une biopsie pulmonaire avant. Celle-ci a confirmé que ma fibrose pulmonaire était bien idiopathique. Par contre, le médicament ne me convenait pas. Cette année, en janvier, j’ai eu une grippe qui m’a beaucoup fatiguée. J’ai été mise sous oxygène en permanence. J’ai refait une infection pulmonaire au mois de mai. Depuis, je ne peux plus rien faire, je ne peux même plus aller chez mes enfants. J’ai perdu 53% de ma capacité respiratoire. J’ai parlé avec les médecins du nouveau médicament antifibrosique qui arrive mais je ne me fais pas d’illusion, ma maladie est à un stade très avancé… Je souhaite que l’on trouve un traitement efficace pour les autres car je sais combien cette maladie est cruelle à vivre, pour soi, et pour l’entourage. »

 

Association de patients :

Lutte contre la fibrose pulmonaire
LCPF
29 avenue de Bir-Hakeim
93130 NOISY-LE-SEC
France

Téléphone : 33 (0)7 60 48 49 96
Contacter le secrétariat : 
Icfp-asso@hotmail.fr

 

 

Un nouvel espoir de traitement : l’Esbriet® (pirfenidone)

 

Jusqu’à très récemment, aucun traitement réellement efficace n’existait pour combattre la fibrose pulmonaire idiopathique. En mars 2011, la Commission Européenne a autorisé la mise sur le marché de l’Esbriet® (pirfenidone), premier médicament approuvé contre la FPI.

 

Cette autorisation permet la commercialisation de ce médicament anti-fibrotique et anti-inflammatoire dans les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne. L’Esbriet® est indiqué pour le traitement chez l’adulte des formes légères à modérées de la fibrose pulmonaire idiopathique. « Ce médicament est déjà commercialisé au Japon depuis 2008 » indique le Dr Bruno Crestani, pneumologue à l’hôpital Bichat-Claude Bernard (Paris). « Au moins 3 études ont montré que ce médicament ralentissait l’évolution de la maladie par rapport à un placebo » explique-t-il. En revanche, « on ne sait pas encore si cela va influencer la durée de vie à long terme » précise le Dr Crestani.

 

Ce médicament sera commercialisé en Allemagne le 15 septembre et en France début 2012. Un espoir pour les plus de 100 000 patients en Europe.

 

 

Zoom sur l’Esbriet® (pirfenidone)

 

L’Esbriet® est une petite molécule administrée par voie orale qui inhibe la synthèse du TGF-beta, un médiateur chimique qui contrôle de nombreuses fonctions cellulaires, dont la prolifération et la différenciation, et joue un rôle clé dans la fibrose. Il inhibe également la synthèse du TNF-alpha, une cytokine dont on sait qu’elle joue un rôle actif dans les inflammations.

 

 

Fibrose pulmonaire idiopathique : une recherche très active

 

« La recherche continue, au moins 25 molécules différentes sont en cours d’investigation » souligne le Dr Crestani. La plupart des essais sont en phase précoce, mais certains sont en phase 3 (celle-ci vise à confirmer à grande échelle l'efficacité et la sécurité du médicament). « C’est le cas d’un médicament des laboratoires Boehringer Ingelheim ; nous incluons des malades dans cet essai thérapeutique » nous apprend le Dr Crestani. En revanche, « une étude a été arrêtée aux Etats-Unis : elle testait l’effet des anti-coagulants mais il s’est avéré que ceux-ci ne ralentissaient pas l’évolution de la maladie et présentaient même un danger » indique-t-il. Autre piste : celle des anticorps thérapeutiques pour prévenir l’accumulation de fibroblastes dans le poumon.

 

En outre, le traitement de référence, constitué par la cortisone à faible dose, les immunosuppresseurs et la N-acétylcystéine, un anti-oxydant, est en train d’être évalué contre placebo - ce qui n’a encore jamais été fait - dans un essai en cours aux Etats-Unis. Tout comme l’efficacité de la N-acétylcystéine seule est évaluée contre placebo. « Cette recherche très active constitue un réel espoir pour les malades » conclut ce pneumologue.

 

Source : communiqué de presse Intermune, mars 2011 ; interview du Dr Bruno Crestani, 14 septembre 2011

 

La fibrose pulmonaire de cause connue : fibrose pulmonaire et maladie professionnelle

 

Asbestose, silicose, bérylliose, poumon du fermier…Des maladies professionnelles peuvent être responsables de fibrose pulmonaire. Zoom sur les principales.

 

Plusieurs métiers, en particulier ceux qui impliquent un contact avec de l’amiante, de la pierre concassée ou de la poussière de métal peuvent entraîner une fibrose pulmonaire. L’inhalation de ces fines particules endommage les alvéoles et cause une fibrose. Certaines substances organiques comme les moisissures du foin peuvent aussi causer la fibrose pulmonaire : c’est ce que l’on appelle le poumon du fermier.

 

Asbestose : l'asbestose est une fibrose pulmonaire secondaire à une exposition en général professionnelle à des fibres d'amiante. L’amiante a été utilisée de façon massive dans la construction au cours des années 1960 et 1970. L’inhalation de fibres d’amiante peut induire une fibrose pulmonaire grave après seulement quelques années d’exposition. Les professions exposées ? Electriciens, tôliers-carrossiers d'automobiles, plombiers, couvreurs, chauffagistes, maçons, plâtriers, peintres, menuisiers charpentiers, mécaniciens…

 

Silicose : la silicose est due à l’inhalation de poussières de silice libre. Lorsque l’exposition à la silice est intense et prolongée, des particules de silice restant dans le poumon sont responsables d’une réaction inflammatoire. Autour de ces particules de silice se forment des nodules fibro-hyalins. L’évolution peut se faire progressivement par la suite vers la fibrose pulmonaire, qui s’installe en quelques mois ou sur plusieurs années dans les formes très sévères. De nombreuses professions exposent aux poussières de silice : personnes qui travaillent dans les mines de houille, celles qui font des travaux de forage, abattage, concassage, broyage, polissage, taille, ponçage de roches renfermant de la silice, le sablage, la fabrication de poudres à nettoyer…

 

Bérylliose : la bérylliose est une inflammation des poumons causée par l'inhalation prolongée de poussières ou de fumées contenant du béryllium. Elle entraîne une fibrose pulmonaire grave. Le béryllium est un métal dont l'utilisation industrielle est très répandue. Activités où l’on trouve du béryllium : métallurgie du béryllium, micro-électronique, fabrication de prothèses dentaires…

 

Poumon du fermier :le poumon du fermier est une maladie allergique causée par la respiration de poussières de foin moisi. D’autres poussières peuvent causer cette maladie, notamment les poussières de paille, de maïs, d'ensilage, de céréales…Lorsque des antigènes (poussières étrangères à l’organisme) sont inhalés, une réaction antiallergique se produit alors, avec la production d’anticorps. Dans un premier temps, on assiste à une inflammation de l’alvéole. Succède un envahissement des globules blancs et une modification des structures alvéoles-capillaires : les échanges gazeux avec le sang sont perturbés. Dans la suite de l’évolution on aboutit à une fibrose pulmonaire.

 

 

Fiche santé n° 20

 

Peut-on prévenir la fibrose pulmonaire ?

Pr Dominique Valeyre

 

Les personnes exerçant une activité les exposant à des aéro-contaminants (par exemple les prothésistes) doivent bénéficier de toutes les mesures nécessaires pour réduire leur exposition au minimum (par exemple, port d’un masque, hotte aspirante). Ils doivent faire l’objet d’une information et d’un suivi par la médecine du travail.

Il faut savoir penser à une possible cause médicamenteuse au moindre doute de causalité et suspendre le traitement après avis du prescripteur en fonction du rapport bénéfice/risque.

Le tabac peut aggraver le risque dans un contexte génétique prédisposant de développer une fibrose pulmonaire idiopathique et cette information doit être donnée aux familles des patients atteints, qu’ils aient une fibrose familiale ou non (un cas apparemment isolé pouvant être un premier cas familial).

 

 

Dossier « La Lettre du Souffle » n° 65 CNMR

Dans notre onglet "témoignages", vous trouverez celui de Gérard, vivre avec une fibrose pulmonaire.