FAUT-IL PLONGER DANS LE RÉGIME SANS GLUTEN ?

 

 

DEVEZ-VOUS ARRÊTER LE GLUTEN ?

 

 

 

Difficile de décider à votre place si vous devez arrêter le gluten. Pour répondre à cette question, il faut remonter très loin dans le mode de vie traditionnel de l'être humain, le comparer à ce qu'il est devenu quand nous avons commencé à manger des céréales, et donc du gluten, et enfin expliquer les effets sur la santé des nouveaux blés hybridés, que nous mangeons massivement depuis les années 60. 

  

Si mes explications vous parlent, si vous vous reconnaissez dans les symptômes que je décris, vous pourriez alors avoir envie d'essayer vous aussi d'arrêter le gluten, pour voir la différence. Mais ce sera à vous de choisir.

 

 

Le blé, une bénédiction pour l'humanité

 

 Disons-le tout net : le blé, qui est notre principale source de gluten, est une bénédiction pour l'humanité. 

  

Sans lui, nous serions encore dans des cavernes, à arpenter la Terre à la recherche de larves, de feuilles, de racines, de baies et d'animaux.

  

L’homme ne pouvait pas manger les céréales sauvages qu'il trouvait dans la nature car les céréales crues contiennent des anti-nutriments, qui bloquent l'absorption de certains nutriments comme les minéraux. Ceux qui mangeaient des céréales développaient donc des carences, et s'affaiblissaient. 

  

Pendant des millions d'années donc (on estime que les premiers hominidés ont 8 millions d'années), ils en furent bien souvent réduits à être charognards. Pour ne pas mourir de faim, ils devaient manger les animaux qu'ils trouvaient déjà morts, de vieillesse... ou de maladie.

 

 

Les grandes découvertes qui ont tout changé

 

 Ce n’est que très récemment, dans les 100 000 dernières années que les conditions de vie des hommes se sont considérablement améliorées. 

 

 

D'une part, l'homme a développé la lance, le harpon et le filet, qui lui ont permis – enfin ! – de manger de la viande et du poisson frais en plus grande quantité. D'autre part, il a découvert la cuisson des céréales, qui réduit fortement l'activité des anti-nutriments. 

 

 

Il s'agissait toutefois uniquement des céréales poussant naturellement. L'homme ne savait pas comment les cultiver. 

  

Ce n'est qu'il y a 15 000 ans que les premières tentatives de faire pousser du blé (sans doute la première céréale domestiquée par l'homme) ont eu lieu... pour s'arrêter aussitôt.

 

La vie agricole plus difficile que la vie nomade (au début)

 

 En effet, il s'est rapidement avéré que faire pousser sa nourriture était beaucoup plus incertain que le mode de vie nomade. D'abord, quoi qu'on en pense, le principe de l'agriculture n'est pas si évident.

  

Ensuite, nos ancêtres étaient constamment cernés de tribus hostiles : 30 % d'entre eux mourraient d'homicide, contre 3 % de la population au 20e siècle (malgré deux Guerres mondiales et les 100 millions de morts des dictatures socialistes et national-socialiste). Aujourd'hui encore, des Kung du désert du Kalahari, en Afrique du Sud, aux Inuits dans l'Arctique, en passant par les Aborigènes d'Australie, les deux-tiers des chasseurs-cueilleurs contemporains vivent en état de guerre permanente. Quatre vingt dix pour cent sont en guerre au moins une fois par an. Et une femme se fait en moyenne enlever et violer trois fois au cours de sa vie par une autre tribu ! Défricher, labourer, planter, puis récolter nécessite un minimum de tranquillité et de sécurité. 

 

 

De plus, à supposer qu'ils aient eu des semences et qu'ils aient été en paix, il leur était très difficile de s'installer dans un endroit suffisamment longtemps pour les faire pousser. Le mode de vie ancestral impliquait que, dès qu'une tribu arrivait quelque part, elle mangeait tout ce qui se trouvait à proximité. Il n'y avait aucun moyen de stockage. Si quelqu'un avait planté des choses, le temps que la récolte arrive, la tribu était partie depuis longtemps. 

 

 

Enfin, et surtout, les débuts de l'agriculture entraînèrent un fort appauvrissement de l'alimentation et des conditions de vie plus difficiles. Il n'y avait qu'un nombre très limité de plantes domestiquées : le petit épeautre et des formes d’avoines et d’orge anciennes. Le régime des premiers agriculteurs était donc plus pauvre que celui des nomades, et leur santé bien plus mauvaise. 

 

 

L'agriculture mauvaise pour la santé

  

De nombreuses maladies, inconnues jusqu'alors, et liées aux carences de leur alimentation, sont apparues, à commencer par l'ostéoporose, le diabète et les problèmes cardiaques. 

 

 

Les céréales sont en effet très caloriques car riches en amidon, qui se change en glucose au contact de la salive et des sucs digestifs (amylase) : en manger provoque une brutale montée du taux de sucre dans le sang. Lorsque ce pic de sucre atteint le cerveau il stimule les mêmes régions du plaisir et de la dépendance que les drogues, ce qui explique la place qu'ont pris les céréales et les produits à base de céréales dans notre alimentation moderne. 

 

 

Mais à long terme, les pics de glycémie sont mauvais pour l'organisme, ils accélèrent le vieillissement de tout l’organisme et favorisent le diabète. De plus les céréales sont pauvres en vitamines et en minéraux, par rapport à d’autres aliments comme les fruits et légumes, les graines et les racines qui étaient consommés par l'homme. Ce sont des calories « vides ». 

 

 La situation sanitaire des populations agricoles se dégrada encore avec le développement de l'élevage, rendu possible grâce à la sédentarité. La promiscuité avec les bestiaux causa l'apparition des maladies transmises par les animaux comme la grippe, la variole et la rougeole. 

 

 

La conséquence fut que l'espérance de vie régressa. La taille moyenne, elle aussi, baissa de 1,78 m pour les hommes et 1,68 m pour les femmes, à respectivement 1,60 m et 1,55 m. Il fallut attendre le XXe siècle pour que la taille moyenne humaine revienne à ses niveaux d'avant l'apparition de l'agriculture. En 1900 la moyenne de l’espérance de vie de l’être humain dans le monde n’était que de 31 ans !

 

 

L'agriculture n'a pas été inventée pour des raisons économiques

 

 Si bien que les anthropologues n'ont toujours pas compris quel diable a pu pousser les hommes à faire pousser des céréales. Ils supposent que ce sont en fait des raisons d'ordre idéologique ou religieux, et non économique. Certaines tribus se seraient mises à faire pousser des céréales dans le cadre de rituels. Et ce n'est que peu à peu qu'elles se seraient aperçues qu'elles pouvaient les récolter et en vivre. 

 

 Explosion démographique

  

J'ai commencé par dire que le blé avait été « une bénédiction pour l'humanité ». 

  

C'est que, malgré les effets désastreux de l'agriculture sur la santé des êtres humains, elle présentait un avantage qui s'avéra décisif : cultiver entraînait l'obligation d'un mode de vie sédentaire, qui permettait aux femmes d'avoir plus d'enfants et aux hommes de se consacrer à d’autres activités comme la science ou les arts. 

  

En effet, les chasseurs-cueilleurs se déplaçaient en permanence et il fallait donc porter les enfants sur son dos, ce qui supposait de ne pas avoir plus d'un petit à la fois. Une femme ne pouvait tout simplement pas avoir plus d'un enfant tous les quatre ans. Avec l'agriculture, le paléodémographe Jean-Pierre Bocquet-Appel estime que le taux de fécondité passa de 4-5 enfants à 7 enfants par femme en moyenne. 

 

 

Après les premières tentatives d'agriculture, il fallut encore plus de 7 000 ans pour que se développe la première civilisation qui connut un vrai succès de développement, grâce aux céréales. Cela se produisit en 3000 avant JC, en Mésopotamie (actuelle Irak), dans une région appelée le « croissant fertile ». 

 

 

C'est là qu'apparurent les premières villes de grande taille (Babylone, Ninive). C'était donc il y a 5000 ans. Le peuple qui réussit cet exploit s'appelle les Sumériens. Les Sumériens furent les premiers à connaître une division du travail à grande échelle. Cela permit une forte augmentation de la productivité et de la richesse, et il ne leur fallut alors que peu de temps pour inventer l'écriture... et les impôts. 

  

A partir de là, le Monde n'allait plus cesser de compter, à divers endroits de plus en plus nombreux, des groupes d'hommes bénéficiant d'importants surplus de nourriture, grâce à la culture des céréales. Parmi eux, certains allaient pouvoir consacrer leur vie non plus à se nourrir et à faire la guerre, mais à l'artisanat, l'industrie, la religion, les sciences, les arts.

  

Il ne fallut plus que très peu de temps à l'homme pour partir sur la lune, inventer Internet et l'Ipad. 

 

 

Le blé mal digéré par l'homme

  

Pour pouvoir digérer un aliment, il est nécessaire d'avoir dans son système digestif des enzymes correspondant à cet aliment. C'est la raison pour laquelle les vaches et les chevaux peuvent brouter, et pas nous. 

 

 

Les enzymes peuvent se développer au fur et à mesure qu'évoluent les conditions de vie. Mais cela ne peut pas se faire du jour au lendemain. 

 

 Or, c'est très rapidement que les céréales ont pris une place prépondérante dans le régime alimentaire de l'homme. La civilisation sumérienne, la première à avoir reposé essentiellement sur la production agricole céréalière, date d'il y a 5 000 ans seulement. 

  

5 000 ans, cela peut paraître il y a longtemps, mais si vous rapportez la durée d'existence de l'humanité (8 millions d'années) à une année de 365 jours, c'est comme si cela s'était produit le 31 décembre à 19 heures !

  

L'homme n'a donc pas eu le temps de développer les enzymes nécessaires pour digérer toutes les protéines contenues dans le blé, et nous allons voir que ce sont justement ces protéines qui sont à l'origine de nombreux problèmes de santé. 

 

Ces problèmes existent depuis les origines de l'agriculture, mais ils ont pris tout récemment une dimension épidémique du fait des hybridations du blé, qui ont rendu cet aliment de plus en plus étranger à nos tubes digestifs. 

  

Le blé est un aliment ultramoderne

 

 Vous réalisez maintenant que les céréales ne sont pas du tout un aliment ancien ni traditionnel à l'échelle de l'histoire des hommes. C'est un aliment ultramoderne, mais qui, grâce à son mode de culture et sa richesse calorique, permet à la population de se multiplier, bien qu'en moins bonne santé. 

  

         Jean-Marc Dupuis  - Nature – Santé – Innovation

 

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Voici maintenant un autre avis, celui de :Paule Neyrat, Diététicienne

 

 

 

Sommes-nous tous ou presque intolérants au gluten ?

 

 

 

La question peut se poser devant la déferlante, depuis quelques mois, tant en Europe qu’aux États-Unis, des adeptes du régime sans gluten qui ne cessent de clamer ses bienfaits, people et sportifs de haut niveau en tête.

 

 

 

  • Le gluten, c’est quoi ?

  • Qu’est-ce que l’intolérance au gluten ?

  • Comment savoir si on a une intolérance au gluten ?

  • Faut-il se mettre au régime sans gluten ?

     

    Le gluten, c’est quoi ?

     

    Une substance composée essentiellement de deux protéines qui se trouve dans les graines des céréales, sauf dans celles du maïs et du riz.

     

    Le gluten ne se dissout pas dans l’eau. Mélangé avec celle-ci, il forme une masse visqueuse, collante et élastique (d’où son nom, issu de « glu »).

     

    C’est cette propriété qui permet de fabriquer du pain : les bulles de gaz carbonique (CO2) qui se forment lors de la fermentation de la pâte sont enfermées dans le réseau formé par le gluten, ce qui la fait « lever » mais lui donne aussi son élasticité et sa souplesse, ce qui permet de la mastiquer ensuite facilement quand le pain est cuit. 

    Bien évidemment, c’est le même phénomène qui intervient dans les gâteaux à pâte levée. Sans gluten, pas de brioche !

     

    Par ailleurs, le gluten extrait du blé et réduit en poudre est très employé dans la boulangerie industrielle mais aussi dans l’industrie alimentaire pour épaissir et donner du liant à certaines préparations genre sauces, plats cuisinés.

     

    Autrement dit, en dehors du pain, des pâtes et de très nombreux autres produits à base de farine de blé, de seigle, d’avoine et d’orge, le gluten est très présent dans notre alimentation.  

     

    Qu’est-ce que l’intolérance au gluten ?

     

    C’est une maladie digestive très compliquée, appelée maladie cœliaque, et qui n’est pas récente. Elle fut décrite la toute première fois au 2ème siècle par Aretius de Cappadoce, un médecin grec. De là vient son nom, dérivé du mot grec koelia, qui signifie « abdomen ».

     

    En 1888, un médecin anglais, Samuel Gee, en détaille les symptômes chez l’enfant : diarrhée chronique, anorexie, fatigue, ventre ballonné, etc. En 1950 et en Hollande, un jeune médecin, D.W. Dicke, publie sa thèse sur le rôle essentiel des céréales et l’intérêt du régime sans gluten.

     

    Les recherches se sont poursuivies ensuite permettant de mieux décrire le rôle du gluten dans cette maladie cœliaque. On sait maintenant que c’est une maladie immunitaire : le gluten déclenche une réaction inflammatoire de la muqueuse intestinale (d’où l’autre nom d’intolérance au gluten). Peu à peu, celle-ci s’abîme et ne fait plus correctement son boulot.

     

    La digestion se fait mal et l’absorption des éléments nutritionnels est de plus en plus perturbée.

     

    D’où un tas de catastrophes survenant au fil des ans. Elles vont de la fatigue à l’anémie et à la perte de poids, en passant par l’ostéoporose, l’installation d’une autre intolérance, celle au lactose, des atteintes diverses et variées du système nerveux, des douleurs articulaires et même parfois une dermatite herpétiforme (démangeaisons, cloques rouges).

     

    On ne sait toujours pas pourquoi certain(e)s sont victimes d’une intolérance au gluten. On est seulement certain que c’est en grande partie héréditaire : on en a même identifié les principaux gènes. On sait aussi que les diabétiques de type 1 courent plus le risque d’en développer une.

     

    Comment savoir si on a une intolérance au gluten ?

     

    L’intolérance au gluten se manifeste par des troubles divers et variés, allant de la constipation aux diarrhées, en passant par les ballonnements, les crampes intestinales, les nausées. Parfois aussi par des douleurs articulaires, de la déprime, des démangeaisons et des rougeurs.

     

    Mais tous ces symptômes peuvent avoir d’autres origines, en particulier les troubles digestifs qui sont les mêmes que ceux du fameux côlon irritable, tellement fréquent.

     

    C’est pourquoi le diagnostic de l’intolérance au gluten est très difficile à établir à partir seulement des symptômes.

     

    Il existe heureusement un test sanguin qui détecte les anticorps spécifiques de l’intolérance au gluten. S’il se révèle positif, on fait alors une biopsie, un prélèvement des tissus dans l’intestin grêle qui permet de juger de la gravité de l’atteinte de la muqueuse. La mise au régime sans gluten ensuite confirme ou infirme le diagnostic.

     

    On estime actuellement que 1 personne sur 100 souffre de maladie cœliaque. Mais ce chiffre est remis en question et il serait en moyenne de 1 personne sur 270 dans les pays occidentaux. Selon certains chercheurs, il serait même plus élevé, faute de dépistage systématique.

     

 

 

Faut-il se mettre au régime sans gluten ?

 

 

 

http://ts1.mm.bing.net/th?id=H.4823051813324423&pid=1.9&w=300&h=300&p=0Un régime difficile à suivre

 

 

 

Même s’il existe de nombreux produits « sans gluten » ou « gluten free » et uneAssociation Française des Intolérants au gluten qui en tient une liste précise, même si quelques restaurants « sans gluten » existent, même si, sur Air-France, on peut commander un plateau « sans gluten », le régime est particulièrement difficile à suivre étant donné la fréquence de cette substance parfois cachée dans les produits industriels. Mais aussi, et surtout, parce que le fait de se passer de tous les produits issus des céréales autres que le maïs et le riz est loin d’être évident.

 

 

 

Si vous pensez que vous souffrez de la maladie cœliaque, il faut d’abord consulter un gastro-entérologue, et ce avant d’entamer un régime sans gluten sinon les résultats du test sanguin seront faussés.

 

 

 

Mais si vous voulez plonger dans ce régime pour tenter d’être aussi performant que le champion de tennis Novak Djokovitch (chez qui une vraie maladie cœliaque a été diagnostiquée en 2011) et/ou d’obtenir la minceur et la jolie peau des stars américaines qui revendiquent d’être « gluten free », bref, de céder à la mode actuelle, vous devez vraiment bien y réfléchir.

 

 

 

Vous ne risquez pas vraiment de carence nutritionnelle mais vous vous exposez sévèrement à une carence sociale et familiale.

 

 

 

En effet, vous serez obligé(e), sauf dans un restaurant «sans gluten », de manger tout(e) seul(e). Il est évidemment hors de question de mettre vos enfants à ce régime. 
Il n’est pas évident non plus d’arriver chez des amis ou chez Tatie Danièle avec votre-manger-sans-gluten dans une boîte ou de faire le tri sélectif tout au long du repas !
 

 

Sources : Gee S. On the coeliac affection. St Bartholomew’s Hospital Reports 1888 ; 24 : 17-20. 

 

Green PH. The many faces of celiac disease: clinical presentation of celiac dis- ease in the adult population. Gastroenterology 2005 ; 128 (Suppl. 1) : S74-8.

 

 Sprue - maladie cœliaque, une maladie aux multiples visages. Patrick Aepli, Dominique Criblez. Forum Med